Le phénomène de résonance
De Tesla à la mécanique quantique via le pont de Tacoma
Phénomène à la fois banal et fondamental la résonance est
l'un des aspect les plus universels de la physique moderne. En acoustique par
exemple on la retrouve aussi bien au niveau des vibrations de la corde d'une
guitare que pour des cavités contenant un gaz . Elle est aussi présente dans les
matériaux solides où elle se manifeste soit sous une forme exploitée volontairement, comme dans les
générateurs piézoélectriques, ou sous une forme parasite que l'on cherche à
réduire au maximum comme les résonances de structure des bâtiments. Le cas pas
relativement récent de la destruction du pont de Tacoma est souvent cité en
référence et illustre l'importance grandissante que prend la notion de
résonance dans les structures macroscopiques. Il est plus rarement dit que Tesla,
incontestable précurseur dans l'utilisation de résonances EM, a aussi en guise
d'illustration joué avec de telles résonances mécaniques, ainsi avec un simple vibreur judicieusement placé et accordé, il
a failli provoquer l'effondrement de l'immeuble qui abritait ses premières
machines polyphasées.
L'exploitation plus ou moins consciente du phénomène de résonance est
au moins aussi ancienne que que le premier instrument de musique soit
probablement antérieur à l'apparition de l'homme moderne, il faudra toutefois
attendre la découverte des résonances atomiques pour que l'on commence à
concevoir l'ampleur réellement universelle qu'il revêt.
Comme de nombreux autres aspects, il se décline sous des formes macroscopiques
classiques, comme la corde de la guitare pour lesquelles nous avons des images
conceptuelles confortables, et sous des formes quantiques beaucoup plus
abstraites. Actuellement nous ne disposons d'aucun modèle physique microscopique
qui nous permettrait de relier les quantifications observées à des vibrations
d'une sorte de milieu. Les tentatives d'introduction d'un milieu EM élastique du
type éther, support des ondes et d'une manière plus générale des champs et qui
soit accessible à l'expérience directe ont toutes échoué à cause notamment de
cette dernière condition (voir pour une discussion plus poussée sur ce sujet la
page Espace-temps). Certaines théories
modernes toutefois, à l'image de celle des cordes
quantiques, qui conçoit les masses des particules, pour l'instant
obtenues de manières purement empiriques, comme des modes de résonance desdites
cordes, pourraient rendrent les masses et charges calculables. Il n'est pas impossible, bien que de nombreux chercheurs
en doutent fortement, que nous puissions un jour pour les particules de matière concevoir un nouveau sous
modèle physique
conceptualisable simplement (pour plus de détails voir
Variables bien
cachées).
Photo : le pont de Tacoma juste avant la rupture
Interprétables ou non, les résonances sont au coeur de la physique moderne et
occupent comme nous allons le montrer un rôle de tout premier plan dans les
technologies nouvelles "wireless energy" impliquant des couplages non rayonnants
en champ proche.
La combinaison de deux formes d'énergie
La résonance résulte de l'oscillation de l'énergie entre deux formes, l'une potentielle ou encore quasi-statique et l'autre cinétique. Les oscillations permanentes s'il n'y a pas de frottements ne peuvent être atteintes que pour une fréquence particulière, en effet si le mouvement était plus rapide l'énergie cinétique serait plus grande que l'énergie potentielle disponible, inversement si le mouvement était plus lent une partie de l'énergie potentielle ne serait pas convertie en mouvement. Ainsi un tel système s'il n'y a pas de pertes peut osciller indéfiniment en conservant son énergie. Inversement si on arrive à y injecter progressivement de l'énergie son énergie interne va croître indéfiniment ou tout du moins jusqu'à ce que la linéarité du comportement soit brisée par un nouvel évènement. L'exemple le plus simple est celui de la balançoire, un tel mouvement est très peu dissipatif (si les roulements sont bien huilés ou les cordes suffisamment souples), il faut donc très peu d'énergie pour le maintenir indéfiniment. Si on injecte au cours d'un cycle plus d'énergie que les pertes correspondantes alors le mouvement va progressivement s'emballer jusqu'a ce que quelque chose de nouveau apparaisse brutalement comme une rotation complète autour de l'axe, une rupture mécanique ou l'éjection de la masse principale (ouille !). C'est cette possibilité d'amplification des mouvements à moindre coût énergétique qui permet de faire apparaître de nouveaux effets qui seraient quasiment inaccessibles en l'absence de résonance.
L'idée de recyclage local
Dans les situations de couplage électrique ou magnétique, l'énergie ne se transfère que de manière dynamique, en l'absence de mouvement aucune travail ne serait mis en oeuvre et aucune énergie transférée. On peut par contre imaginer des mouvements à vitesse constante, comme par exemple l'aimant placé sous la table qui fait glisser celui placé au dessus, ou encore des rotations mécaniques d'aimants ou de dipôles électriques comme cela est fait dans de nombreuses machines rotatives de types moteurs ou génératrices. Dans le cadre des circuits dit "solid-state" où le mouvement des charges s'exécute à l'intérieur de conducteurs eux même au repos, la solution la plus simple à mettre en oeuvre est de contrôler des oscillations de charges et de courants. Nous avons vu dans les pages précédentes concernées aux couplages que sur un cycle seule une fraction de l'énergie mise en oeuvre dans de telles oscillation peut être transférée à distance, cette fraction étant d'autant plus petite que le couplage est faible. Dans de telles situations où le couplage est progressivement diminué, pour pouvoir continuer à transférer autant d'énergie, il faut donc augmenter simultanément l'amplitude des oscillations du côté du générateur. Il en résulte que pour avoir un système efficace il faut que l'énergie non transférée continue à osciller librement avec le minimum de pertes possibles. Pour obtenir un transfert d'énergie significatif un mécanisme de résonance est donc nécessairement associé aux systèmes dynamiques à faibles couplages.
Transfert d'énergie entre deux pendules couplés mécaniquement
Sous une forme cinétique, une partie de l'énergie pourra être transférée à distance au cours d'un cycle, le reliquat de cette dernière resté sur place devra donc être reconverti à chaque oscillation sous une forme d'énergie stockée localement ou autrement dit sous forme d'énergie potentielle afin d'être recyclé lors du cycle suivant.
Diagramme représentant les formes d'énergie impliquées dans le cas des pendules couplés oscillants
Les formes prisent par le mode cinétique (celui qui participe directement au couplage) et le mode potentiel sont extrêmement variables d'un domaine physique à l'autre. En électromagnétisme, comme il s'agit d'action à distance et que les champs utilisés sont abstrait (n'ont pas de sous représentation physique claire) on peut choisir une autre représentation du phénomène. Ainsi on considèrera une forme d'énergie stockée de manière externe dans le vide ou le milieu diélectrique et qui participera directement au couplage qui oscillera avec une forme d'énergie stockée de manière interne dans un composant spécifique. Le champ extérieur participant au couplage pouvant ainsi être soit électrique soit magnétique.
La localisation des pertes
Le lien qui permet le couplage à distance peut être
extrêmement ténu sans engendrer de pertes significatives, dans de tels cas les
pertes sont liés à des effets propres au générateur et à la charge distante, les
pertes sont ainsi totalement disjointes du couplage. C'est le cas des champs
proches EM non rayonnants où l'énergie se transfère sans pertes via le vide (ou des
particules ou l'espace-temps ou tout ce que l'on peut imaginer sauf le néant),
les pertes d'origines matérielles essentiellement dues à l'effet Joule, sont localisées uniquement à
l'intérieur des dispositifs et sont grandement dépendantes des technologies
utilisées.
Il est bien évident qu'aucun modèle ondulatoire simple ne peut décrire de tels
échanges (sauf ceux à faisceaux orientés de type laser totalement
incompatibles ici avec d'une part la situation physique et d'autre part le principe du rasoir d'Occam).
L'idée de force à
distance (rattachée conceptuellement à celle de milieu convoyeur) est la seule qui nous
permette de donner un éclairage raisonnable à de tels cas (pour ceux qui
auraient encore des doutes voir l'introduction de la page
Poisson Laplace et Matrices).
Le facteur de qualité
Le facteur de qualité est défini comme le rapport de
l'énergie qui oscille entre les deux formes pendant un cycle et les pertes
(usuellement par frottements) pendant la même durée. Plus le facteur de qualité
est élevé est plus le dispositif ou l'élément est apte à résonner fortement. La
plupart des dispositifs macroscopiques ont des facteurs de qualité guère plus
grand que l'unité, c'est à dire que l'énergie des oscillations est dissipée en
quelques cycles. Toutefois il existe des dispositifs pourtant simples qui peuvent
avoir des facteurs de qualité très élevés. C'est le cas par exemple pour les
pendules dits de Foucault qui mettent en oeuvre des masses très importantes
suspendues avec très peu de frottements. La période des oscillations obtenues
pouvant atteindre plusieurs dizaines de secondes, les vitesses et par suite les
pertes par frottement sur l'air sont extrêmement faibles, l'amortissement se
produit sur des journées entières. Un petit calcul conduit à des facteurs de
qualité de l'ordre de dix mille.
Il n'y a pas que des gros systèmes de ce type qui peuvent atteindre de très
grand facteurs de qualité, une simple corde de guitare, après avoir été
sollicitée peut mettre plusieurs seconde à s'amortir alors qu'elle bât plusieurs
centaines de fois par seconde ce qui donne des facteurs de qualité de plusieurs
milliers, le record est obtenu pour certaines vibrations de cristaux comme le
quartz qui, sous vide, peuvent atteindre des facteurs de qualité d'environ dix
millions. Dans le domaine électromagnétique certains circuits résonants peuvent
atteindre des facteurs de qualité de l'ordre du millier.
Il faut préciser que le cas des circuits résonants électriques est un peu
particulier car contrairement aux cas mécaniques simples cités précédemment les
deux formes d'énergie peuvent être contenues dans deux composant bien distincts,
typiquement un condensateur et une bobine. On peut alors définir un facteur de
qualité pour chacun des éléments en mesurant le rapport de l'énergie stockée à
l'énergie perdue dans ce composant. Ainsi on constate que les condensateurs
peuvent atteindre des facteurs de qualité extrêmement élevés (plusieurs
centaines de milliers dans l'air et le vide, et nettement moins mais des valeurs
qui restent souvent très élevées pour la plupart des diélectriques). Pour les
bobines ou inductances les valeurs sont en général beaucoup plus faibles autour
de quelques dizaines au mieux pour de petits bobinages bien conçus et de l'ordre
du millier pour des bobines de tailles métriques, à noter que l'usage de
certains matériaux magnétiques peut permettre d'améliorer sensiblement les
performances des petites inductances, notamment à bas niveaux d'énergie (de tels
matériels ne sont en général pas linéaires leurs pertes augmentant en proportion
fortement avec l'amplitude). On peut toutefois réaliser des bobines à air avec
des matériaux supraconducteurs présentant des facteurs de qualité extrêmement
élevés. Un circuit LC réalisé sous vide et refroidi en dessous du point critique
pour que le métal (ou la céramique conductrice) utilisé atteigne un régime supraconducteur
pourrait atteindre n'en doutons pas des performances au moins voisines de celle
du quartz.
Rendement : le produit caractéristique
Nous avons vu que le coefficient de couplage n'a pas de
rapport direct avec le rendement, il représente seulement le rapport entre
l'énergie transférée et celle qui est mise en oeuvre. Nous venons de voir que de
son côté le facteur de qualité représente le rapport entre l'énergie mise en
oeuvre et les pertes. Le produit de ces deux valeurs représente donc le rapport
entre énergie transférée et pertes. Si ce rapport est grand l'énergie transférée
est plus grande que les pertes et le rendement élevé si au contraire ce rapport
est petit la puissance transférée sera plus petite que les pertes et le
rendement faible. Pour un rapport égal à l'unité le rendement sera de 50% (les
matheux trouverons très simplement la formule qui donne le rendement en fonction
de ce produit caractéristique en écrivant que la puissance totale mise en oeuvre
au niveau du générateur est la somme de l'énergie transférée et des pertes).
Ce produit est mixte, il fait intervenir d'une part le couplage qui caractérise le lien entre le générateur et la charge distante et d'autre part la technologie employée et la qualité des composants utilisés, il montre directement, qu'en ce qui concerne le rendement, un lien ténu peut être compensé par un facteur de qualité élevé. Ce point est bien entendu d'une extrême importance, combiné au fait que le champ proche décroît très rapidement avec la distance, il conditionne directement la portée pratique que peuvent atteindre de tels dispositifs.
La double résonance
Nous allons sommairement expliquer pourquoi l'énergie transférée dépend
non seulement de l'aptitude du générateur à résonner, comme nous l'avons
illustré avec l'idée de recyclage de l'énergie non transférée, mais aussi,
souvent à parts égales, de l'aptitude de la charge
à résonner.
Reprenons l'exemple classique des deux pendules couplés (on pourrait aussi bien
considérer deux cordes de guitare accordées). Si le pendule distant a une
faible amplitude, alors la force qui lui est appliquée à distance ne travaillera que très
peu puisque le travail est le produit de la force par la distance parcourue et
il n'extraira que très peu d'énergie du champ. Si au contraire son amplitude
d'oscillations est plus grande et si l'on suppose qu'il est suffisant distant
pour ne pas perturber significativement le pendule générateur et qu'ainsi la
force appliquée reste donc la même que dans le cas des petites oscillations alors il extraira une plus grande
quantité d'énergie du champ puisque le produit force distance est plus grand. Vu
du côté du pendule distant qui résonne soumis à une excitation périodique,
l'énergie éventuellement extraite, est une forme de perte qui vient se
rajouter aux pertes par frottement. La quantité d'énergie que l'on peut extraire
dépend donc directement de l'aptitude du pendule distant à résonner et
donc de son facteur de qualité.
Interprétation physique de la double résonance
Ainsi si l'on décompose le problème via l'artifice des champs en deux étapes on peut dire que le facteur de qualité du générateur est une sorte de mesure de son aptitude à produire un champ extérieur oscillant intense pour une perte d'énergie donnée alors que du côté de la charge le facteur de qualité sera une mesure de sa capacité à extraire de l'énergie du champ qui l'environne. Sans rentrer dans des détails techniques, les subtilités mathématiques de cette double résonance seront abordées dans la page sur les circuit résonants couplés, ont peut dire que le caractère quadratique du couplage se retrouve dans la notion de double résonance, comme pour le coefficient de couplage, les calculs montrent que le facteur de qualité global est en gros égal à la moyenne géométrique des deux facteurs de qualité de part et d'autre du lien.
Développer davantage le formalisme et les concepts
Non merci, notions suivantes SVP